Dans chaque numéro, Mark Adam partage avec nous ses connaissances et ses anecdotes sur la science que constitue l’architecture de parcours de golf. Aujourd’hui, il évoque la personnalité et la créativité de l’architecte Desmond Muirhead.
Laissez-moi vous parler un peu de desmond Muirhead, l’architecte de golfs le plus imaginatif de son époque. C’était un excentrique qui a exercé une influence majeure sur le développement des parcours et sur de nombreux d’architectes qui sont aujourd’hui ses héritiers.
Desmond Muirhead est né en Angleterre en 1923 et est décédé en Californie en 2002. Il a étudié le design urbain à Cambridge, puis a poursuivi ses études à l’université de Colombie-Britannique et de l’Oregon. durant la guerre, il était navigateur de la Royal Air Force. Contrairement à la plupart des architectes l’Américain, freiné par un handicap, ne jouait que rarement. Il s’est associé à Gene Sarazen à la fin des années 1960, qui le considérait comme le plus grand architecte de son temps, puis à Jack Nicklaus au début des années 70. Le duo n’a pas fait long feu. Sa séparation difficile avec Nicklaus après la conception de Muirfield Village dans l’Ohio l’a même poussé à quitter le métier d’architecte pendant près de douze ans. Il a néanmoins exercé une grande influence sur le travail ultérieur de du Golden Bear.
Au milieu des années 1970, Muirhead part vivre tour à tour en Australie, à Hawaï et en Asie, où il s’est concentré sur la création de grands projets de développement communautaire. Une grande partie de son travail de conception en matière de planification était à la pointe du progrès. Il a ainsi inventé l’expression « Golf Course Community ». Le concept : le terrain de golf détermine la forme de la communauté et non l’inverse. Il a été le premier à réellement se pencher sur le positionnement des logements par rapport à un trou de golf, et sur la manière dont les routes devraient circuler dans un programme comprenant un golf, ainsi que sur l’intégration de sentiers naturels et de pistes cyclables. Il considérait que le clubhouse devait être conçu comme un centre communautaire et que le terrain de golf pouvait servir à contenir et à retenir le drainage des eaux de pluie dans un lotissement. dans les années 1970, Muirhaed a fait œuvre de pionnier en matière de conception de golf intégrant des habitations. Par exemple, à Muirfield Village, dans l’Ohio, il a conçu le parcours avec Jack Nicklaus, mais c’est également lui qui a aménagé la ville adjacente. Il était convaincu que l›architecte du parcours devait aussi être celui du projet immobilier.
En ce qui concerne la conception de parcours de golf, celui qui est né à Norwich mais possède la nationalité américaine, estimait qu’il devait y avoir un rythme, un équilibre et une séquence. Le rythme étant le rapport entre la difficulté et la surprise. L’équilibre étant la relation entre chaque boucle de neuf trous, les par 3, les par 4 et les par 5. La sséquence quant à elle étant l›ordre des trous et la façon dont le parcours se déroule. Cela étant dit, il estimait qu’à l’inverse, si vous jouez sur un parcours de golf et que vous savez tout de celui-ci dès la première fois, alors cela signifie que l’architecte a échoué.
Dans les années 1980, il revient aux affaires et imagine des parcours plus éclectiques, radicalement différents de ceux qu’il avait réalisés auparavant. Il était connu pour s›immerger dans la culture de la région où il travaillait pour apprendre à connaître les gens, leurs traditions. Il tentait de les comprendre. à cette époque, nombre de ses conceptions de parcours ont inclus des motifs symboliques, des personnages mythologiques, tels que Jupiter ou Pégase, mais aussi ce qu’on appelle le « land art ». L’exemple le plus marquant concerne certainement la conception du trou n°7 au Stone harbor Golf Club, dans le New Jersey, qu’il a appelé Clashing Rocks, qui n’existe malheureusement plus. Elle était basée sur un mandala, un motif qui en Sanskrit signifie «cercle magique», symbolisant l’intégration complète des opposés pour créer un tout.
Un génie en somme, un touche à tout, un créateur fourmillant d’idées resté malheureusement dans l’ombre.
Mark Adam – fairways n°79