L’équipe de fairways a été véritablement conquise par une nouvelle d’Emmanuel Gédouin qui mélange golf, amours contrariés et mélancolie autour d’une chasse aux sangliers sur un ancien parcours : Nettoyer les sous-bois.
Directeur commercial pour la très golfique marque Callaway, Emmanuel Gédouin anime aussi un blog de chroniques littéraires et musicales, Le tour du nombril, et publie des nouvelles dans Kanyar, une revue réunionnaise semestrielle de création littéraire. Nous vous livrons quelques extraits de cette nouvelle que vous pourrez retrouver plus bas et surtout dans Kanyar n°8, Les Amis de Kanyar, (avril 2021, 174 pages. 14 auteurs, 14 récits) :
(…) Je vis ici depuis trois ans. Je suis le gardien solitaire d’un golf abandonné en Sologne, trente kilomètres d’Orléans, quarante de Blois. Une longue histoire que le père de mon ex-compagne a écrite pour moi. Un domaine de quatre-vingts hectares, une prison magnifique à l’écart de tout (..) Tout est resté intact. Les tables et les chaises, les têtes de cerf et de sangliers aux murs, le bar et même quelques bouteilles à moitié vides sur les étagères. Tout est là, même la vitrine aux trophées. Des coupes qui témoignent du passé. Et mon nom, un peu partout comme sur ce grand panneau en bois où s’affiche le palmarès du championnat du club. Alexandre Desrousseaux, Champion Hommes de 2004 à 2009. Et juste à côté le palmarès féminin, Championne Dames de 2005 à 2008, Marie Malapert, la mère de ma fille. En 2008, Marie est tombée enceinte, elle a arrêté de jouer. (…) À dix-huit ans, je suis devenu numéro un européen. À dix-neuf, numéro un mondial amateur. On parlait de moi comme d’un phénomène un peu atypique. Je tapais la balle moins loin que les autres, je n’étais pas un gros frappeur mais un manieur de balles qui faisait peu d’erreurs. Pour moi, un dix-huit trous était un chemin solitaire et j’entrais parfois dans une sorte de transe figée qui m’empêchait d’exprimer mes émotions sur le parcours et de communiquer avec mes partenaires. Les autres me trouvaient bizarre, c’est vrai que je ne partageais pas grand-chose avec eux. (…) Avec la factrice, on est allés dans le club-house. Elle s’est enfoncée dans un fauteuil, j’ai allumé un feu et décapsulé deux bières. Elle a commencé à m’expliquer qu’elle voulait attirer les bêtes dans un seul endroit, leur faire bouffer des graines mélangées à des puissants somnifères, les buter un par un, les couper en petits morceaux et remplir tous les congélateurs de la région ni vu ni connu. (…)
Plus d’infos : revuekanyar.com
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