fairways, le magazine de la culture golf. Numéro 79 daté novembre 2021

Si vous êtes un habitué du magazine, vous savez que nous aimons sortir des fairways battus. Pendant longtemps, les puristes nous ont d’ailleurs regardés de haut, trouvant notre parti pris trop éloigné des préceptes de Saint-Andrew et de l’orthodoxie qui sied aux vrais pratiquants. Il nous semblait (nous le pensons toujours) que le golf serait encore plus
plaisant à jouer en dépoussiérant quelques uns de ses usages surannés et en mettant de vrais morceaux de plaisirs dans le jeu. Cette évolution nécessaire (qui a en fait déjà largement eu lieu) concerne la forme mais pas le fond : plus que jamais, il est indispensable de conserver au golf les valeurs (fortes) et les principes (nobles) qui lui confèrent un attrait sans égal. L’étiquette, dans un monde qui en manque de plus en plus, fait que le golf est un peu plus qu’un sport, davantage qu’une discipline et va bien au-delà d’un simple loisir.

Si nous ré-affirmons ces principes, c’est que nous entendons de plus en plus souvent des arguments qui voudraient que « pour attirer de nouveaux joueurs, il faut casser tous les codes ». Avec de drôles d’exemples à l’appui : alors que de passage sur un golf nous nous étonnions du nombre de joueurs en jean sur le parcours, le directeur des lieux nous a répondu : « nous ne les forçons pas à acheter une tenue, sinon ils ne viendraient pas jouer ». Vraiment ? « Tous les golfs devraient d’ailleurs faire cela, cela permettrait d’avoir davantage de joueurs en France.». Outre l’aspect esthétique très discutable ce cette stratégie, notons que dans les « grandes » nations du golf, la tenue reste imposée… « Un magazine décalé comme le votre devrait défendre cette idée ». Euh… Passons sur ceux qui affirment que le golf est « fun quand on frappe fort » (droit ou pas) ou les organisateurs de compétitions pour débutants qui ritualisent le Mulligan. A force de vouloir séduire tout le monde, le risque est de ne plaire à personne. Il faut bien sûr faciliter l’accès au golf mais sans pour autant le dénaturer. Sa nécessaire démocratisation (celle-ci est d’ailleurs déjà réelle : on peut jouer un peu partout à des tarifs raisonnables, en tout cas pour moins cher qu’en pratiquant le sport mécanique ou même le ski) ne doit pas faire oublier que le golf a suffisamment d’atouts intrinsèques pour susciter l’envie : dépassement de soi, défi technique, activité physique, lien avec la nature… Nous ajoutons dans ce numéro sa faculté à faire rêver avec trois Resorts qui, en plus des plaisirs de la petite balle blanche, offrent le meilleur de l’existence. Certes, y séjourner coûte cher (trop pour la plupart d’entre nous) mais c’est le prix du rêve, celui qui fait naître des vocations et tire toute la filière vers le haut. Et il est important que de tels lieux d’excellence existent (même si le jean ne semble pas y être une option), et surtout co-existent dans l’hexagone avec des parcours publics ou des pitch & putt ouverts à tous.

Vous avez bien sûr remarqué en couverture « Iron Woods », une illustration de Christophe Lassaut qui est, entre autres, le directeur artistique de notre confrère Golf Magazine (nul n’est parfait…). Il a imaginé qu’après les fers et les bois, ce sont les joueurs qui allaient devenir hybrides, mi-champions, mi-super héros. Au moment de choisir cette illustration nous nous sommes dit que c’était peut être la dernière fois que nous mettions Tiger Woods, alors que sa carrière est entre parenthèses depuis son accident de voiture, en couverture de fairways. Mais à la réflexion, rien n’est certain : les super-héros comme Tiger sont capables de tout, même des plus improbables come-back…

Antoine Davot